«Depuis le 4e siècle
jusqu'au 8e siècle existait déjà une tension dans
l'église entre l'Est et l'Ouest à propos du vrai sens de
la primauté de Rome. (...) Cette tension latente vint seulement
en surface au 9e siècle quand elle s'est développée
en hostilité ouverte.
L'événement politique
qui a occasionné ce conflit fut la fondation de l'empire carolingien
dans l'Ouest.
(...) Quand un projet de mariage
entre Charlemagne et l'impératice byzantine tomba à l'eau,
le roi Franc décida de ruiner la réclamation de Constantinople
à la juridiction universelle. Un moyen employé pour arriver
à ce but fut de placer des accusations d'hérésie contre
l'Est. L'empereur oriental ne pouvait se réclamer d'être le
successeur des premiers rois (basileis) chrétiens parce qu'il adorait
des images et parce qu'il confessait que le Saint-Esprit procédait
«du Père par le Fils» au lieu du «Père
et du Fils». Ces allégations par Charlemagne dans son fameux
Libri Carolini, envoyé au pape en 792, ont formé une partie
de la réfutation Franche des décrets du second concile oecuménique
de Nicée en 787 et préparé la voie pour une querelle
interminable entre l'Est et l'Ouest sur la question du Filioque. Pendant
le 6e siècle certains conciles anti-Ariens en Espagne avaient inséré
dans le credo de Nicée-Constantinople le mot Filioque absent dans
l'original (Credo... in Spiritum Sanctum... qui ex Patre Filioque procedit).
Cette nouvelle version du credo
s'est répandue en Gaule et dans les terres Franches au 8e siècle.
Elle fut résistée par l'Église de Rome jusqu'au 11e
siècle avant d'être acceptée.
(...) Heureusement pour la cause
de l'unité de l'église, même si l'Église romaine
appuyait les objections politiques de Charlemagne, elle était alors
fermement opposée à son attaque théologique sur Byzance.
Les papes Adrien I (772-795) et Leo III (795-816) ont défendu le
concile de Nicée et formellement rejeté l'interpolation dans
le credo. P.41-43
(...) La transcendance de Dieu comprise
par les Pères de l'Église est que Dieu demeure inconnaissable
dans son essence unique mais qu'il s'est révélé lui-même
comme étant une trinité de 3 personnes. Par conséquent
le Dieu de la Bible est connu dans la mesure qu'il est une divinité
vivant et active, Celui qui a envoyé son Fils pour le salut du monde.
Cette emphase particulière
de la pensées des Pères grecs orientaux les distingue (...)
de la manière par laquelle leurs frères latins occidentaux
préfèrent comprendre Dieu comme étant tout d'abord
une unique essence, et ensuite seulement une trinité. Ces deux attitudes
différentes seront à l'origine de deux écoles de théologie
divine. Dans la théologie latine, les personnes divines sont considérées
comme de simples relations internes de l'unique essence de la divinité:
donc, si l'existence même du Saint-esprit est déterminée
par ses relations avec le Père et le Fils, la doctrine du Filioque
- ou procession de l'Esprit par le Père et le Fils - devient une
nécessité logique, dogmatique, parce que l'Esprit ne peut
être dit distinct du Fils s'il ne procède pas de lui. Les
théologiens orientaux, d'un autre côté, demeurèrent
fidèles au vieux «personalisme» des Pères grecs.
La doctrine du Filioque était par conséquent à leurs
yeux comme du semi-Sabellianisme (pour employer l'expression de Photius).
Le Sabellianisme était une hérésie du 2e siècle
attribuée à Sabellius qui enseignait que les personnes divines
étaient simplement des modes ou aspects d'un Dieu unique. Consubstantiel
avec le Père et le Fils, parce qu'il procède du Père,
l'unique source de la divinité, l'Esprit a sa propre existence et
fonction dans la vie interne de Dieu et l'économie du salut: sa
tâche est d'apporter l'unité de la race humaine dans le Corps
de Christ, mais il procure à cette unité un caractère
personnel, donc diversifié. C'est par une prière au Saint-Esprit
que commencent tous les services liturgiques de l'Église Orthodoxe,
et avec une invocation de son nom que le mystère eucharistique est
effectué.
John Meyendorff, The Orthodox Church,
Crestwood, NY, 1981 P.195-197
Le texte original en anglais se
trouve sur : http://www.ocf.org/
«L'Église occidentale
emploie communément une version du credo de Nicée qui a
le mot latin Filioque («et le Fils») ajouté à
la déclaration que le Saint-Esprit procède du Père.
Certains orthodoxes orientaux ont insisté que cela n'était
pas en harmonie avec la vraie foi.
Mais la Bible révèle
que l'Esprit procède vraiment du Fils. Les relations externes entre
les personnes de la trinité sont le miroir de leurs relations internes.
Comme le Père envoie extérieurement le Fils dans le monde
dans le temps, le Fils procède intérieurement du Père
dans la trinité. Comme l'Esprit est envoyé extérieurement
dans le monde par le Fils aussi bien que par le Père (Jn.15:26 et
Ac.2:33), il procède intérieurement autant du Père
que du Fils. C'est pourquoi l'Esprit est référé comme
étant l'Esprit du Fils Ga.4:6, pas juste comme l'Esprit du Père,
Mt.10:20.»
L'auteur de ce texte cite ensuite plusieurs
pères orientaux qui abondaient dans le même sens, par exemple,
Grégoire le thaumaturge, Basile le Grand.