Le mariage coutumier
La cérémonie s'est déroulée dans la belle grande maison de l'une des soeurs de ma femme.
Les bamilekes pratiquent quelques coutumes intéressantes lors des mariages coutumiers. Après nous avoir accueillis chalereusement, nous avons discuté pendant un temps, puis on a demandé à ma femme de sortir. Un peu plus tard, on a introduit une femme recouverte d'un drap et on m'a demandé si c'était ma femme. J'ai répondu : "Non". Alors j'ai dû débourser pour son "voyage" de retour chez elle. Ce rituel vise plusieurs objectifs : le mari démontre que les autres femmes ne l'intéressent pas et qu'il est l'homme d'une seule femme. Il montre aussi qu'il a un grand coeur et se soucie du bien-être des autres en ne laissant pas la femme s'en retourner sans moyens. Enfin, il montre qu'il est capable de reconnaître sa femme même quand elle est couverte, ce qui veut dire qu'il l'a bien observée.
Ensuite, la scénario voulait qu'on me demande ce que j'étais venu faire ici. J'ai alors fait rire la famille en leur répondant que j'étais venu chercher mon trésor ! Sur la photo suivante, on voit la parenté en train de discuter rondement du montant à exiger pour la dot. Quand j'ai vu le montant fixé pour la dot, j'ai compris qu'on voyait aussi ma femme comme un trésor !!!
La dot est une coutume qui dépasse l'Afrique puisqu'on la retrouve dans la Bible. Par exemple, Jacob a travaillé 7 ans pour son futur beau-père Laban avant de pouvoir marier sa fille alors je peux me compter chanceux que cela ne fut pas mon cas. Je comprends toutefois pourquoi tant de jeunes couples camerounais reportent leur mariage, car sans le mariage coutumier et la dot, il ne peut y avoir de mariage civil ou religieux puisque l'accord des parents est requis. Jamais les parents vont donner leur accord sans avoir reçu une dot substantielle pour leur fille. Pour certains cela peut correspondre à plusieurs mois de salaire, à des années d'économie.
Mentionnons aussi que la dot ne va pas seulement aux parents de la mariée, elle est aussi répartie par la suite dans toute la famille, c'est une manière d'aider la communauté. Toute la culture africaine est axée sur la communauté, sur le collectif. Par exemple, quand tu achètes un terrain, tu paies aussi une dot pour le terrain en plus du prix d'achat. Le terrain est considéré comme une fille et tu te retrouves à payer des gens que tu n'as jamais vu mais qui s'adonnent à être parents ou amis du vendeur. Tu dois payer aussi pour leur transport chez le notaire où ils servent de témoins et signent l'acte de vente, ça devient étourdissant à la longue mais c'est incontournable. Revenons maintenant au mariage coutumier...
Après avoir "renvoyé chez elle" la dame qui n'était pas ma femme (C'était une amie chère qui nous avait accompagnée, elle n'a fait que sortir et enlever le drap pour rejoindre ensuite le groupe). On amena ensuite ma femme recouverte d'un drap elle aussi, je devais montrer que je pouvais la reconnaître par sa forme.
Pour signifier que nous étions maintenant mariés selon les coutumes camerounaises, on nous a apportés deux bouteilles d'eau gazeuse ; une rouge et l'autre jaune. On nous a demandé d'en verser dans un verre, moitié-moitié de chaque bouteille. Le mélange des deux boissons montraient maintenant que de deux personnes différentes nous étions devenus une seule chair et qu'on ne pouvait plus distinguer les boissons d'origine. Ensuite, ma femme m'a donné à boire de ce breuvage et j'ai fait de même avec elle. C'est ainsi que nous avons scellé le mariage coutumier le 15 novembre 2011.
On nous avait préparé un bon repas. La femme doit montrer qu'elle prend bien soin de son mari, alors c'est elle qui me sert (c'est du plaintain frit, très bon au goût). Il y avait aussi du poulet, du poisson, des légumes. Un vrai festin !
Après le repas, les dames ont interprété des chants et des danses traditionnelles, la coutume veut que nous soulignons notre appréciation en allant leur porter des dons en argent que nous plaçons sur leurs fronts. Elle se partageront ensuite les montants entre elles.
A la fin, plusieurs nous ont remis des poulets avec leur nom inscrit sur un bout de papier, c'est une autre forme de dot car nous remplaçons alors les poulets par de l'argent dont le montant varie selon l'importance de la personne concernée. Comme nous ne pouvions évidemment pas manger tous ces poulets déjà cuits, nous les avons remis à ceux qui nous avaient accompagnés pour nous appuyer dans le mariage coutumier.
Ce fut une soirée mémorable, annonciatrice du bonheur qui nous habite depuis ce temps !
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